
Du métro parisien aux toiles
Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Je m’appelle Defun, né en 1974 à Paris. Banlieusard dans l’âme, j’ai grandi dans un environnement où la rue et le métro étaient des terrains de jeu autant que des espaces d’expression.
Comment as-tu commencé le graffiti ?
J’ai commencé en 1989 avec Cokun, dans les rues de Malakoff et sur la ligne 13. Au départ, je posais Pulsar puis Defun, jusqu’à mon premier serrage en 1990. Mais je ne faisais pas encore de graff massif : au début, c’était surtout du tag dans le métro. Le graff, c’était compliqué, et je manquais de bombes. J’ai commencé à dessiner mes premières lettres sur papier en 1990. Mon premier vrai graff ? À Étienne Dolet sur la ligne 13, fin 1989.
Quand es-tu passé aux entrepôts et aux chromes ?
Très vite après ce premier graff. Sous l’impulsion du crew 4AD, on a commencé à explorer les entrepôts de métro. Au départ, on restait entre nous. J’ai surtout « martyrisé » la ligne 13 et la B, mais aussi un peu la A, la 4, la 10, la 7, la 6… Il y avait Eresy, Nes, Hera, Dase, Obsek, Cokun… Grâce à eux, j’ai fait mes premiers chromes sur les voies et quelques terrains.
Quels ont été les premiers tagueurs que tu as rencontrés ?
Les premiers étaient Sine et Bomez, puis Swed et Honk des TBA, Havoc, Ery2, les BAK, Azyle, Abdyk, Kenor… et bien d’autres. Sur train, j’ai surtout peint avec Disney, Eresy, Liric, Obsek, Écho, Kea, Rest, Kenor, Detay, Teusha, Kline… J’en oublie sûrement.

Et le métro ?
On a peint peu de métro. On préférait taguer plusieurs rames plutôt que de gaspiller des bombes pour une seule. C’était souvent des délires, comme le « TUE » dans Paris Tonkar sur la 13.
Quels tags t’ont marqué ?
En banlieue, les TDK de Decay : Bronco, Arsenick, Decker… Dans le métro, les 93MC, et à Paris, Bando et Boxer. Je me souviens aussi des moteurs de Sturdyi sur la 13.
Ton premier vrai crew ?
Les 4AD. Avec des old timers comme Obsek, Dase, Nes, Hera et Eresy. Le groupe s’est étoffé et est resté actif jusqu’en 1995.
As-tu eu des soucis avec la police ?
Quelques petits séjours au poste, mais rien de grave. Juste une bonne amende pour un serrage dans un entrepôt de la 7, en 1992.
Et aujourd’hui, que fais-tu ?
Je suis commerçant, sans lien professionnel avec le graffiti. Je ne peins plus de murs, mais je dessine toujours beaucoup, surtout du lettrage. J’ai découvert l’acrylique et le pinceau après avoir beaucoup travaillé au Posca et au feutre. Pour l’instant, je fais beaucoup de customisation pour les amis — casquettes, sacs — et pour ma fille.
Quelle place le graffiti occupe-t-il dans ta vie aujourd’hui ?
Peindre reste une passion et une détente. J’ai besoin de liberté dans ma création. Faire quelque chose dans un cadre précis ne m’attire pas. Exposer un jour ? Pourquoi pas, quand le moment sera venu.

